Proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France
Du 3 au 5 avril, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a examiné la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France. Ce texte est venu en séance publique du 11 au 13 avril 2023. Retrouvez en ligne, le détail de la proposition de loi à l'issue de la commission. L'Unaf a notamment été entendue sur ses propositions d'amendement concernant la protection juridique des majeurs.
Actualités législatives du 3 au 7 avril 2023
Du 3 au 5 avril, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a examiné la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France. Ce texte est venu en séance publique du 11 au 13 avril 2023.
Le détail de la proposition de loi à l’issue des travaux de la Commission est le suivant.
- L’article 1er crée la conférence nationale de prévention de la perte d’autonomie, chargée de piloter la politique de prévention de la perte d’autonomie au niveau national et de coordonner l’action des conférences des financeurs.
Les évolutions de cet article en commission portent sur :
- la précision selon laquelle la politique de prévention dont il est fait mention dans l’article 1er est bien la prévention de la perte d’autonomie ;
- la conférence nationale de l’autonomie est présidée par le ministre chargé de la politique de l’autonomie ;
- le centre national de preuves de prévention de la perte d’autonomie et de ressources gérontologiques est renommé en « centre de ressources probantes » ;
- la conférence nationale de l’autonomie assure également le suivi et l’évaluation de la mise en œuvre du plan pluriannuel des conférences des financeurs ;
- un volet spécifique consacré au développement de la lutte contre l’isolement des personnes âgées est intégré parmi les domaines sur lesquels porte le programme coordonné de financement défini par les conférences des financeurs.
- L’article 1er bis prévoit la désignation d’un référent en charge de la prévention de la perte d’autonomie dans les établissements et services sociaux et médico‑sociaux prenant en charge des personnes âgées ou en situation de handicap. La personne référente bénéficie d’une formation en matière de santé publique.
- L’article 1er ter prévoit la remise chaque année d’un rapport du Gouvernement sur l’activité de la conférence nationale de l’autonomie et du centre national de preuves de prévention de la perte d’autonomie.
- L’article 2 donne aux services sociaux et sanitaires un accès aux registres des personnes vulnérables et en situation de handicap tenus par les maires afin de lutter contre l’isolement social des personnes âgées et de faciliter la prévention de la perte d’autonomie.
Les évolutions de cet article en commission portent sur :
- les maires peuvent partager les données qu’ils recueillent grâce au registre des personnes vulnérables aux établissements et services sociaux et médico-sociaux prenant en charge les personnes âgées ou en situation de handicap ;
- la transmission des données des bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), de la prestation de compensation du handicap (PCH) et des personnes en GIR 5 et 6 bénéficiaires de prestations d’action sociale de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) aux communes est permise afin de les inscrire sur le registre de personnes vulnérables. Il a été précisé que ces données ne peuvent être transmises qu’avec accord du bénéficiaire ou, le cas échéant, de la personne chargée à son égard d’une mesure de protection juridique. Cette dernière précision correspond à une demande de l’Unaf, qui devra être reprise dans un autre alinéa qui mentionne « le représentant légal », qui n’a pas d’existence en droit sauf pour les mineurs.
- les services sociaux et sanitaires peuvent utiliser le registre des personnes vulnérables pour informer les personnes âgées et leurs proches des dispositifs d’aide et d’accompagnement existants et de leurs droits.
- L’article 2 bis prévoit la remise d’un rapport du Gouvernement portant sur l’évaluation de l’article 2 dans les 18 mois suivant l’entrée en vigueur de la loi. Ce rapport précise les actions de lutte contre l’isolement social menées, leurs résultats et le profil des publics accompagnés.
- L’article 2 ter prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la trajectoire financière de la branche autonomie jusqu’en 2030 au regard des évolutions de la démographie et des besoins. Ce rapport formule des propositions pour affecter progressivement de nouvelles ressources au financement de la branche autonomie et pour garantir la pérennité des financements destinés au fonctionnement et à l’investissement de l’ensemble des établissements et des services sociaux et médico-sociaux.
- L’article 3 inscrit la prévention et la lutte contre les maltraitances dans les missions de l’action sociale et conforte le droit à la vie privée et familiale. Il consacre un droit inconditionnel à recevoir des visites de proches, que ce soit en établissements social et médico-social ou en établissement médical.
L’Unaf a alerté lors de son audition par la rapporteure Annie Vidal, qu’il existait dans cet article une confusion entre le MJPM, la personne de confiance lorsque la personne protégée ne peut exprimer sa volonté.
La commission a apporté des précisions relatives au droit de visite et permettant d’ajouter la mention du droit au respect d’une vie familiale normale. Elle a supprimé les alinéas relatifs aux personnes n’étant pas en capacité d’exprimer leur volonté, dans le but d’éviter toute situation de blocage.
- L’article 3 bis prévoit de compléter le contrat de séjour conclu au moment de l’entrée en ESMS par un projet d’accueil personnalisé.
- L’article 3 ter prévoit que l’accord écrit préalable de l’occupant au contrôle dans son espace de vie privatif, ou l’expression de son refus, est recueilli à l’occasion de la conclusion du contrat de séjour ou de l’élaboration du document individuel de prise en charge qu’il signe lors de l’entrée dans l’établissement ou la mise en œuvre du service à domicile.
- L’article 4 crée une nouvelle instance dont l’objectif sera de recueillir et de traiter les alertes en cas de maltraitance sur des personnes vulnérables. Portées par les ARS via les conférences régionales de santé et de l’autonomie, les alertes recueillies seront ensuite redirigées vers les autorités compétentes dont dépendent les personnes pour l’analyse et le suivi. Un bilan annuel des alertes sera établi.
La commission a adopté un amendement de rédaction globale. Celui-ci a modifié l’article selon plusieurs axes :
- tous les acteurs sont réunis au sein d’une instance qui est située au niveau départemental ;
- l’instance est placée sous la responsabilité des ARS dans le cadre d’une nouvelle mission d’animation territoriale de la politique publique de lutte contre les maltraitances envers les adultes ;
- une fois par an, les données relatives aux maltraitances sont partagées avec les parties prenantes de la démocratie en santé au sein de la commission régionale de la santé et de l’autonomie ;
- une formation dédiée pourra être mise en œuvre par l’École des hautes études en santé publique.
- L’article 5 vise à préciser et clarifier les missions du mandataire de protection judiciaire, dont le rôle est central auprès des personnes en protection judiciaire, notamment dans la préservation de leurs libertés et de leur autonomie. Par ailleurs, cet article vise à introduire une charte éthique que les mandataires devront suivre dans l’exercice de leurs missions. Il prévoit également que les mandataires saisiront l’instance territoriale de traitement et d’alerte des situations de maltraitance, ainsi que le procureur de la République de toute situation de maltraitance portée à leur connaissance dans l’exercice de leurs missions.
Lors de son audition du 31 mars par la rapporteure Annie Vidal, l’Unaf a présenté 3 propositions d’amendement sur cet article pour préciser que les mandataires judiciaires ne pouvaient garantir les libertés publiques de la personne protégée sauf à voir peser sur eux une obligation de résultat. La 2e proposition visait à faire valoir que les mandataires à la protection juridique des majeurs ne pouvaient être soumis à des règles déontologiques comme un ordre professionnel. Enfin, l’Unaf demandait la suppression d’une obligation spécifique imposée aux MJPM sur les évènements graves et maltraitances au motif que les conséquences et les impacts de cette mesure étaient mal évalués avec un risque de doublon avec l’instance territoriale créée par l’article 4.
La Commission a adopté un amendement de la rapporteure réécrivant totalement l’article 5 et prenant en compte les demandes de l’Unaf.
Ainsi les mandataires judiciaires à la protection des majeurs assurent, dans les limites du mandat qui leur est confié, la protection juridique de la personne et de ses intérêts patrimoniaux.
Les MJPM doivent respecter une charte éthique. Toute référence à la déontologie est supprimée. Enfin les MJPM en cas de présence d’une maltraitance saisissent l’instance prévue à l’article 4 et en informe le Procureur de la République.
- L’article 5 bis introduit un livret d’accueil pour la personne accueillie, en format « facile à lire et à comprendre ».
- L’article 5 ter demande un rapport au Gouvernement sur les mesures de contention physique et médicamenteuse réalisées dans les établissements médico-sociaux.
- L’article 5 quater permet au juge des tutelles de désigner un curateur ou tuteur de « remplacement », en anticipation du décès de la personne initialement désignée.
- L’article 5 quinquies crée un mandat de protection future aux fins d’assistance. Cet article s’inscrit dans le cadre des préconisations formulées à l’occasion des États généraux de la justice.
- L’article 5 sexies fait évoluer le dispositif d’habilitation familiale en élargissant la liste des personnes pouvant être habilitées et en prévoyant la possibilité pour le juge de nommer une personne habilitée de « remplacement ».
Ainsi cet article modifie l’article 494-1 du code civil dans un double objectif :
- élargir la liste des personnes habilitées à assister ou à représenter un adulte vulnérable, limitée en l’état actuel à « ses ascendants ou descendants, frères et sœurs », à tout « parent ou allié » ;
- permettre au juge des tutelles de désigner, parmi les autres proches du majeur protégé, une personne habilitée « de remplacement », dont la mission débutera immédiatement et automatiquement au décès de la personne initialement désignée.
Enfin, cet article tire les conséquences des dispositions votées dans le cadre de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, favorisant le prononcé de l’habilitation aux fins d’assistance, en clarifiant le régime juridique de cette mesure.
- Alors que l’article 6 initial autorisait l’expérimentation d’une carte professionnelle destinée aux aides à domicile afin de mieux identifier les personnes intervenant dans l’habitation des personnes âgées, de reconnaître leur qualification et de faciliter leur accès à certains services, en Commission par amendement de la rapporteure Annie Vidal, l’article 6 a été totalement réécrit permettant de procéder directement à la généralisation de la carte professionnelle, sans passer par l’expérimentation et prévoyant une entrée en vigueur au plus tard le 1er janvier 2025.
- L’article 7 prévoit la création d’une aide financière annuelle versée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) aux départements afin de contribuer au développement de solutions de mobilité pour les professionnels de l’aide à domicile.
En Commission, cet article a été modifié de la façon suivante :
- en précisant que l’aide pourra concerner tous les modes de transport individuel ou collectif ;
- dans le but de préciser que cette aide devra concerner tous les territoires ;
- les départements devront transmettre annuellement à la CNSA le montant et les objets de ces affectations ainsi que le bilan de cette aide sur le soutien du secteur du domicile sur le département ;
- veiller à ce que ces financements soient dirigés, lorsque cela est possible, en direction de véhicules à faibles émissions ou très faibles émissions.
- L’article 7 bis demande au Gouvernement un rapport sur les modalités d’augmentation des indemnités du barème kilométriques à hauteur de 0,45 euro par kilomètre pour les professionnels de l’aide à domicile.
- L’article 8 prévoit la remise au Parlement d’un rapport du Gouvernement, dans les 6 mois suivant la promulgation de la loi, évaluant l’organisation et les modalités de financement de l’offre de soutien à domicile, quelle que soit la nature du service d’intervention. Ce rapport sera notamment consacré à des propositions visant à améliorer l’équité de traitement des bénéficiaires et des professionnels de l’aide à domicile.
En commission, plusieurs précisions ont été apportées pour cette demande de rapport :
- les services prestataires pourront être ou non détenteurs de l’habilitation à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ;
- le rapport devra également évaluer les modalités de mise en œuvre d’un pilotage des services autonomie à domicile ;
- le rapport devra formuler des propositions pour assurer l’effectivité de l’expression et de la participation des usagers à domicile ;
- une évaluation de l’adéquation entre les formations des professionnels de l’aide à domicile et les besoins des personnes accompagnées ou qui pourraient bénéficier d’un accompagnement ;
- le rapport évalue aussi quantitativement et qualitativement l’adéquation entre l’offre de soutien à domicile et les besoins des personnes, des familles et des proches aidants, notamment au regard du reste à charge des personnes, du besoin en matériel et de la coordination avec les autres professionnels du secteur médico-social ou de la santé.
- L’article 9 supprime l’obligation alimentaire pour les petits-enfants et leurs descendants s’agissant de l’aide sociale à l’hébergement.
- Avec l’article 10, le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport établissant le bilan de la mise en œuvre de l’aide sociale à l’hébergement. Ce rapport évalue notamment l’opportunité de relever le seuil de recouvrement sur la succession des bénéficiaires. Il évaluera notamment l’opportunité de relever le seuil de recouvrement sur la succession des bénéficiaires, actuellement fixé à 46 000 euros.
- L’article 11 précise que les forfaits soins et dépendances attribués aux EHPAD peuvent prendre en charge des actions de prévention de la perte d’autonomie. Cette disposition vise à encourager le financement d’actions aujourd’hui uniquement prises en charge par le forfait hébergement et pourtant essentielles à la prévention de la perte d’autonomie comme l’intervention d’éducateurs en établissement, ou l’organisation d’activités relatives au sport-santé.
Il a été ajouté en commission que les forfaits soin et dépendance attribués aux ESMS prenant en charge des personnes âgées ou en situation de handicap pourront financer des actions de prévention et notamment, l’intervention de référents qualité. Ces référents sont chargés du suivi des plans d’action pour améliorer la qualité de l’accompagnement, du respect de la réglementation ou encore pour évaluer la gestion des risques.
- Lors des travaux en commission, un amendement est venu compléter cet article en précisant que les forfaits soin et dépendance attribués aux ESMS prenant en charge des personnes âgées ou en situation de handicap pourront financer des actions de prévention et notamment, l’intervention de référents qualité. Ces référents sont chargés du suivi des plans d’action pour améliorer la qualité de l’accompagnement, du respect de la réglementation ou encore pour évaluer la gestion des risques.
- L’article 11 bis reconnaît le pouvoir de prescription du médecin coordonnateur dans les EHPAD et les unités de soins de longue durée et prévoit la possibilité de désigner le médecin coordonnateur, médecin traitant du résident.
- L’article 11 ter renforce les obligations des ESSMS en prévoyant l’automaticité des injonctions et sanctions prononcées par l’autorité compétente envers ces établissements ne respectant pas leurs obligations.
- L’article 11 quater dispose d’une part que les établissements sociaux et médico‑sociaux ont l’obligation de consulter régulièrement les résidents sur le respect de la qualité alimentaire et nutritionnelle des repas servis et d’autre part que les établissements accueillant des personnes âgées respectent un cahier des charges spécifiques, relatif à la quantité et à la qualité nutritionnelle des repas proposés.
- L’article 11 quinquies prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement portant sur la mise en place d’un taux d’encadrement minimal dans les établissements et services accueillant des personnes âgées.
- L’article 12 concerne la mise en œuvre de la réforme de l’évaluation des ESSMS. Alors que le Conseil Constitutionnel avait sanctionné cet article dans le PLFSS pour 2022 au motif qu’il s’agissait d’un cavalier social, cet article permet d’améliorer les procédures d’évaluation de la qualité des ESSMS. Celui-ci comprend plusieurs dispositifs devant accroître la transparence et l’accessibilité à la fois des indicateurs et des résultats de ces évaluations.
En commission, deux amendements ont été adoptés :
- pour anticiper les cas de retrait de l’habilitation par la Haute Autorité de santé à un organisme évaluateur ;
- pour préciser le rôle des recommandations de bonnes pratiques professionnelles dans le cadre du nouveau dispositif d’évaluation de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux élaboré par la Haute Autorité de santé, et en particulier leur prise en compte lors de l’évaluation quinquennale des établissements et services.
L’Unaf a alerté la rapporteure Annie Vidal lors de son audition le 31 mars sur :
- L’article 13 permet la location de locaux communs de logements sociaux pour mettre en œuvre un projet de vie sociale et partagée dans un habitat inclusif.
- L’article 13 bis modifie l’article L. 233-1-1 du code de l’action sociale et des familles pour tirer les conséquences du remplacement du forfait habitat inclusif par l’aide à la vie partagée, qui entrera en vigueur au 1er janvier 2025.
- L’article 13 ter ajoute un volet « habitat inclusif » dans les plans départementaux de l’habitat avec l’objectif d’encourager le déploiement de ce type d’habitat sur l’ensemble du territoire national.
- Selon l’article 13 quater, le Gouvernement remet, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport au Parlement établissant un cadre juridique et financier pour l’hébergement mixte. Ce rapport évaluera le coût du financement des projets, notamment le coût réel des professionnels qui interviennent dans ces hébergements.
- Après cet article, un débat en commission a eu lieu sur la base de plusieurs amendements identiques alertant sur la requalification de l’habitat inclusif en établissement recevant du public pour l’application de le règlementation incendie. Pour rappel, l’Unaf lors de son audition du 31 mars a pris le soin de préciser auprès de la rapporteure les risques qui pesaient sur le développement des projets d’habitat inclusif tout autant que sur les personnes habitant dans ce type d’habitat.
La rapporteure, Laurence Cristol, a pris l’engagement suivant pour l’examen en séance publique « Ces amendements identiques, qui viennent de tous les bords, montrent qu’il y a une réelle difficulté sur le terrain. Toutefois, le sujet étant technique et complexe, je vous propose de retirer vos amendements afin que nous les expertisions et que nous parvenions à une rédaction commune. »
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